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Bonjour et bienvenue dans cette deuxième édition de l’infolettre Impact Formation !
Actualités
Le 15e épisode du podcast Retour sur les Attentes est disponible… et c’est un grand cru ! Joss et moi avons pu nous entretenir avec trois invités canadiens au sujet de leurs pratiques d’excellence.
Aussi, une nouvelle vidéo a été publiée, centrée cette fois sur le sujet central du transfert des acquis de la formation. Au passage, n’hésitez pas à vous abonner à la chaîne YouTube d’EvaluationFormation.
Être capable de… ou être préparé(e) à… ?
Dans la précédente et première édition, il était question de clarifier la “fin” d’une formation, à savoir le moment où elle est effectivement “terminée”.
Indirectement, il en sera encore ici question, tant il est vrai que la perception erronée de la formation comme étant une fin en soi est encore largement répandue. Tenons-en pour preuve l’expression bien connue qui trône souvent en tête des objectifs pédagogiques : “être capable de…”
Si à la fin d’une formation, en tant qu’apprenant, je suis effectivement “capable de…”, alors est-ce que cela signifie que le travail est terminé ?
Pas si vite.
Pourquoi est-il important de modifier cette expression ?
Cette expression pose problème en suggérant que la formation se suffirait à elle-même : “La formation est terminée, maintenant tu es compétent(e) !”
Or, la formation n’est pas une “boîte noire” dans laquelle on insère des personnes qui en ressortent compétentes, comme par magie.
Elle n’est pas une finalité en soi. Elle n’est que le début, ou tout du moins une étape (essentielle, certes), d’un parcours qui doit mener à une montée en compétences et, éventuellement, à un résultat.
Nous perdons les opérationnels dans des débats terminologiques
Pour pallier cela, il est souvent recommandé de distinguer les “livrables” attendus à chaque étape de la formation :
À l’issue de la formation : des objectifs pédagogiques (ou d’apprentissage), préfixés par “être capable de…”, qui décrivent les connaissances (ou capacités) à acquérir.
Quelque temps après la formation : des objectifs opérationnels (ou professionnels, ou de formation…) qui décrivent les compétences à maîtriser.
Quiconque a déjà observé les échanges sur les réseaux sociaux l’admettra sans encombre : il y a toujours des débats et des oppositions concernant la bonne utilisation de ces termes.
Savoir, savoir-faire, savoir-être, connaissances, capacités, compétences, objectifs pédagogiques, d’apprentissage, opérationnels, professionnels, de formation…
Utiliser cette panoplie de termes est le meilleur moyen de perdre les opérationnels, qui n’ont que faire de nos distinctions pédagogiques et terminologiques, alors que leur implication est déterminante pour le succès de la formation.
Rappelons que ces termes relèvent avant tout de conventions de langage. Pour avoir échangé à maintes reprises avec des spécialistes de la formation aux États-Unis ou au Canada, j’ai pu remarquer que leurs définitions varient aussi sensiblement.
L’approche pragmatique que je vous propose
Dans le chapitre 4 de mon livre, j’invite mes lecteurs à en finir avec cette distinction entre objectifs d’apprentissage et objectifs de formation, entre capacités et compétences, pour adopter des objectifs comportementaux axés sur le “faire” (l’observable, le mesurable, le concret…).
L’objectif principal est de se focaliser sur un même “livrable” tout au long du processus d’acquisition des compétences.
Les objectifs comportementaux décrivent donc les comportements attendus en situation de travail, comportements qui sont, en quelque sorte, la manifestation visible des compétences mises en œuvre.
On opère ainsi une sorte de “fusion” entre ce que l’on appelle habituellement les objectifs pédagogiques/d’apprentissage et les objectifs opérationnels/de formation.
Pour illustrer cela, prenons le “grand classique” de la formation à un logiciel tableur :
Objectif pédagogique : À l’issue de la formation, vous serez préparé(e) à créer des tableaux croisés dynamiques.
Objectif comportemental : Créer des tableaux croisés dynamiques.
Dans l’approche que je vous propose, l’objectif pédagogique correspond au niveau 2 du modèle Kirkpatrick (pour simplifier le propos : “Je sais/sais faire”) tandis que l’objectif comportemental correspond au niveau 3 (“Je fais”, une fois de retour en situation de travail).
Dans les deux cas, les objectifs sont formulés de la même manière, au mot près, en débutant par un verbe d’action, et en décrivant une pratique concrète, qui peut être évaluée tant en formation (via des exercices, des simulations, etc.) qu’en situation de travail. La taxonomie de Bloom (ou une autre) peut être ici très utile.
Cela n’empêche pas d’avoir des sous-objectifs pédagogiques, par exemple pour chaque séquence de formation. Mais cela doit rester l’affaire des pédagogues, pas celle des clients, internes comme externes.
Pour expérimenter cette pratique depuis plusieurs années, j’en tire beaucoup de bénéfices, notamment dans le fait d’instaurer un dialogue sain avec les opérationnels/commanditaires. Elle permet aussi d’engager davantage les apprenants en les responsabilisant pour passer à l’action.
Il est à noter que la pratique consistant à utiliser les termes “être préparé(e) à…” a été utilisée initialement par les Kirkpatrick pour formuler les objectifs de leur programme de certification de niveau argent.
Passez à l’action
Voici quatre actions à mener pour utiliser des objectifs concrets tout au long du processus de formation :
Formulez vos objectifs en partant des comportements attendus en situation de travail : avec l’aide de ceux qui connaissent le terrain (apprenants, managers, etc.).
Utilisez ces objectifs pour construire le contenu de formation adéquat : c’est l’alignement pédagogique qui est visé.
Utilisez ces objectifs pour évaluer les acquis comme leur transfert : l’utilisation de l’expression “être préparé(e) à…” sera ici très utile.
Communiquez ces objectifs aux acteurs concernés à chaque étape du parcours de formation : avant, pendant, après… le fait d’utiliser un seul et même type de “livrable” facilitera l’évaluation et, in fine, favorisera l’impact.
Une formation efficace est un processus en trois phases, avec une préparation et un accompagnement dignes de ce nom. Entre les deux, on “prépare” les apprenants à affronter la troisième phase.
Et c’est déjà pas mal.
À bientôt pour une prochaine édition,
Jonathan
P.S. : si vous avez apprécié cette édition, n’hésitez pas à cliquer sur le cœur et à la partager avec votre entourage professionnel.
Quand vous le souhaiterez, je peux vous aider de trois manières :
Mon livre L’évaluation de la formation : qualifié d’utile et pragmatique par ses lecteurs.
Programmes de certification Kirkpatrick : le moyen le plus efficace pour monter en compétences sur le sujet de l’évaluation. Vos formations prendront une nouvelle dimension. Et vous aussi.
Conseil sur demande : le moyen le plus simple et accessible pour avancer sur l’une de vos problématiques. D’autres prestations sont également possibles.