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Bonjour et bienvenue dans cette 21e édition de l’infolettre Impact Formation !
Actualités
Je me suis rendu à Lausanne (Suisse) du 23 au 25 novembre 2024 pour participer au séminaire international “Generat°IEF : échanges et transmissions entre générations de chercheurs et d’experts en ingénierie des évaluations en formation”. De nombreux chercheurs et praticiens étaient présents, venant de différents pays (Belgique, Bolivie, Canada, République démocratique du Congo, États-Unis, France, Maroc, Pays-Bas, Suisse). J’en suis reparti intellectuellement nourri et toujours aussi amoureux de la Suisse.
Par ailleurs, les sessions pour 2025 du programme de certification Kirkpatrick de niveau bronze sont planifiées. C’est le meilleur moyen de monter en compétences sur le sujet de l’évaluation des formations !
Transformer ses formations grâce à la pratique active
Si vous questionnez les attentes des participants en amont des formations, ou au début de celles-ci (à l’occasion d’un classique tour de table), vous devriez entendre fréquemment qu’ils veulent de la pratique. Ils préfèrent éviter les contenus trop théoriques. Nous ne sommes pas là pour opposer les deux, tant il est vrai que la théorie comme la pratique sont nécessaires pour apprendre.
D’après mon expérience, je ne peux constater que trop souvent, les formations laissent peu de place à une réelle mise en pratique. Pourtant, un des objectifs essentiels des formations est que les participants puissent dire à la sortie :
“J’ai déjà expérimenté, pratiqué et essayé cette pratique durant la formation !”
Le défi réside dans la conception des formations : comment faire en sorte que les comportements attendus en situation de travail soient expérimentés de manière réaliste pendant la formation elle-même ? Sans cela, les participants quittent la salle avec des connaissances théoriques, mais sans savoir comment les appliquer.
Dans cette édition, nous allons voir comment intégrer de la pratique active dans vos formations.
Pourquoi est-il important de pratiquer ?
“C’est en forgeant qu’on devient forgeron.”
“Comme jouer du violon ou du piano, penser exige une pratique quotidienne.” Charlie Chaplin
L’absence de pratique concrète en formation réduit son efficacité. Sans opportunités pour s’exercer, les participants n’ont pas l’occasion d’expérimenter ce qu’ils apprennent dans un environnement simulé ou semi-réaliste. Ils risquent donc :
D’oublier rapidement ce qu’ils ont appris, faute d’ancrage.
De manquer de confiance pour appliquer leurs acquis, car ils n’auront pas eu la chance de tester et d’affiner leurs actions.
D’être frustrés et de percevoir la formation comme une perte de temps, surtout si elle ne répond pas à leurs besoins pratiques.
Nombre d’études et d’expériences montrent que la pratique en formation augmente la probabilité de transfert sur le terrain. Il est donc de notre devoir de laisser place à la pratique. Mais de quelle pratique parlons-nous ?
Ne confondons pas pédagogie active et pratique active
La pédagogie active et la pratique active sont parfois utilisées comme des synonymes, mais elles diffèrent dans leurs objectifs et leurs résultats.
La pédagogie active regroupe des méthodes qui impliquent les apprenants dans le processus d’apprentissage, en les plaçant dans des situations où ils doivent réfléchir, échanger, ou construire des savoirs par eux-mêmes.
Exemples courants :
Groupes de discussion ou brainstorming : les apprenants partagent leurs idées ou analysent des concepts ou notions ensemble.
Études de cas ou travaux en sous-groupe : les participants travaillent sur une situation fictive ou plus ou moins réelle, discutent des meilleures approches et les présentent.
La pratique active place les participants dans des situations réalistes où ils peuvent agir concrètement pour s’exercer à appliquer leurs apprentissages. Cela leur permet de :
Se familiariser avec les gestes, processus ou décisions qu’ils devront reproduire.
Recevoir des retours immédiats pour corriger ou renforcer leurs actions.
Exemples typiques :
Jeux de rôle contextualisés : un manager pratique un entretien de feedback avec un collaborateur fictif dans une mise en situation basée sur des cas réels de son entreprise.
Simulations immersives : un commercial joue une négociation face à un client fictif, en suivant les étapes d’un modèle enseigné.
Exercices individuels spécifiques : un participant rédige un plan d’action ou crée un livrable professionnel directement lié à ses tâches.
En résumé, la pédagogie active engage intellectuellement (réflexion, échanges). La pratique active va plus loin : elle engage physiquement et cognitivement dans des actions concrètes proches du quotidien professionnel.
Mon approche : consacrer une large part à la pratique active
La pratique active est l’un des 12 leviers recensés par le Dr Ina Weinbauer-Heidel dans son livre “What makes training really work”. Elle est aussi la fondatrice de l’Institute for Transfer Effectiveness qui propose un programme de certification dont j’ai déjà parlé dans cette infolettre (en étant l’un des heureux certifiés !).
Après avoir suivi ce programme, qui a le mérite de “faire ce qu’il préconise”, j’ai pris pleinement conscience de l’importance de réellement pratiquer en formation. Si j’insiste sur le terme réellement, c’est parce que je le distingue clairement des exercices, études de cas, jeux de rôle, etc., qui ne sont pas pleinement en lien avec les situations de travail vécues par les participants.
Il s’agit donc d’intégrer directement dans la conception des formations des opportunités concrètes de mise en œuvre.
Voici quelques principes clés de cette approche :
Des situations réalistes pour pratiquer les comportements souhaités : pendant la formation, les participants doivent expérimenter les concepts, outils ou modèles enseignés dans des contextes qui imitent leur environnement de travail. Les exercices pratiques doivent être conçus pour que les participants réussissent progressivement, afin de les encourager et de renforcer leur motivation. Cela aide à solidifier leur engagement envers le changement.
Une part significative du temps dédiée à la pratique active : la conception de la formation doit prévoir que 30 à 50 % du temps soit consacré à des exercices pratiques, au lieu de se contenter de théories ou discussions.
Du temps de travail autonome : ou “temps libre structuré”. Soyons réalistes : de retour à leur poste, les participants sont pris dans un tourbillon d’activités et de priorités. Le temps nécessaire pour approfondir, expérimenter ou appliquer les notions vues en formation est rarement disponible. Si la formation ne leur offre pas un espace dédié à ce travail personnel, les chances qu’ils le réalisent ultérieurement sont faibles. Quelques exemples d’exercices à prévoir au cours de la formation afin d’être utiles immédiatement et exploités au quotidien :
Un manager rédige un plan de développement pour son équipe.
Un commercial prépare un argumentaire pour son prochain rendez-vous client.
Un chef de projet identifie des actions concrètes pour mieux gérer les parties prenantes.
En suivant ces principes, la formation devient une véritable opportunité d’expérimentation et non, simplement, une session de transmission d’informations.
On ne devient pas cycliste en regardant une vidéo sur la pratique du vélo. Tout comme on ne devient pas bon manager en écoutant une présentation PowerPoint. Faites de vos formations une piste d’entraînement, pas une salle de cours !
Passez à l’action
Voici quelques étapes à suivre pour intégrer davantage de pratique active dans vos formations :
Transformez vos concepts et notions en actions concrètes : analysez vos modules de formation et identifiez ce que vous pourriez transformer en exercice pratique. Par exemple, remplacez une présentation magistrale par une simulation, un jeu de rôle, un cas concret tiré du quotidien des participants, du temps libre pour travailler sur leur projet, etc. Restez alignés avec les comportements attendus en situation de travail (niveau 3 de Kirkpatrick).
Mesurez le ratio théorie/pratique : évaluez la répartition du temps de formation entre les explications théoriques et les exercices pratiques. Votre objectif : consacrer au moins 30 à 50 % du temps à des activités pratiques, en ajustant si nécessaire pour atteindre ce seuil.
Testez en conditions réalistes : créez des situations qui reflètent au plus près le contexte de travail des apprenants. Par exemple : adaptez vos scénarios à leurs enjeux réels, intégrez des contraintes similaires à celles qu’ils rencontrent sur le terrain, etc.
Offrez un feedback immédiat et utile : valorisez ce qui a bien été fait tout en pointant des axes d’amélioration spécifiques pour guider les apprenants vers une meilleure maîtrise.
Recueillez des retours et ajustez : à la fin de chaque session, demandez aux participants ce qu’ils ont trouvé utile dans les exercices pratiques et ce qu’ils aimeraient voir amélioré. Utilisez ces retours pour affiner vos activités et les rendre encore plus pertinentes.
Faites un pilote : si vous le pouvez, choisissez un groupe d’apprenants pour expérimenter un module où 50 % du temps est réservé à la pratique active. Comparez leurs retours avec ceux d’un groupe ayant suivi une formation classique.
En mettant l’accent sur la pratique active, vous aiderez vos participants à transformer leur apprentissage en actions concrètes et impactantes.
À bientôt pour une nouvelle édition,
Jonathan
P.S. : si vous avez apprécié cette édition, n’hésitez pas à cliquer sur le cœur et à la partager avec votre entourage professionnel.
Quand vous le souhaiterez, je peux vous aider de trois manières :
Le livre L’évaluation de la formation : qualifié d’utile et pragmatique par les lecteurs des trois premières éditions (plus de 6 000 exemplaires vendus). La quatrième édition, coécrite avec Jean-Luc Gilles, présente une refonte de 80 % du texte.
Programmes de certification : le moyen le plus efficace pour monter en compétences sur l’évaluation de l’impact des formations (Kirkpatrick) ou le transfert des apprentissages (Learning Transfer Designer). Vos formations prendront une nouvelle dimension. Et vous aussi.
Conseil sur demande : le moyen le plus simple et accessible pour avancer sur l’une de vos problématiques. D’autres prestations sont également possibles.
Votre contenu est très intéressant et invite à considérer la posture de formateur sous l'angle de la facilitation, ce que j'apprécie.